Boubacar Traoré "Kar Kar"
Dans les années soixante, les maliens se réveillaient chaque matin au son de sa voix mélancolique à la radio qui chantait l'indépendance. Kar Kar, on l'appelait "blouson noir" et chaque malien de sa génération se rappelle avoir dansé sur ses tubes "Mali Twist" et "Kayeba" dans lesquels il incitait ses compatriotes à revenir et construire le pays. II était le Chuck Berry, l'Elvis Presley malien, mais sa musique étant uniquement diffusée par la radio, Il n'avait pas d'argent en poche pour acheter des cigarettes. Il travaillait comme tailleur, commerçant et agent agricole, tout en entraînant des orchestres le soir et en chantant pour ses intimes.
Quand, en 1987, la télévision l'invite enfin en studio, les maliens n'en reviennent pas, tout le monde le croyait disparu. Deux
ans plus tard, un drame le frappe, Pierrette, sa femme aimée qu'il chante dans ses plus douces chansons, meurt. Désorienté, le coeur lourd, Il part en France pour travailler. Les
week-ends Il chante dans les foyers.
Après une absence de vingt ans de la scène, Boubacar
Traoré a ressuscité des cendres de sa propre vie. C'est tellement peu évident qu'il chante encore, et pourtant il est là comme s'il n'avait jamais rien fait d'autre.
Boubacar Traoré est de ses hommes solides qui reflètent l'histoire d'un pays, les espoirs et les désespoirs d'un peuple. Quelle grâce qu'il ait gardé sa voix, et
qu'une chanson comme "Soundiata", qui a fait rêver toute une génération, soit enfin enregistrée. Quelle chance de retrouver cet enfant de l'indépendance malienne mûriet, malgré toutes ses
mésaventures, proche des petits plaisirs de la vie. Lieve Joris |
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